Tout le monde a un ami à chaque étape de sa vie, mais seulement quelques personnes ont le même ami à toutes les étapes de leur vie.
Dormir jusqu’à midi, se faire un déjeuner (ou petit-déjeuner, cela dépendait du contenu du frigo et de l’humeur), se doucher longuement puis enfin s’habiller. Jeremiah regarde quelques instants par la fenêtre, et soupire. Il se demandait s’il ne devait pas se trouver un autre boulot que celui de barman, voire peut-être celui de professeur du Hip-Hop. Non pas que ceci ne lui plaisait pas, mais il n’imaginait pas vivre ainsi. Lui qui avait de grandes idéologies, qui avait abandonné ses études pour vouloir « servir à quelque chose » se retrouvait seulement derrière un comptoir à servir des pochtrons et des malfrats. Il vivait au milieu de toutes les emmerdes de Rio, mais n’y participait pas. Il n’était qu’un spectateur, et ceci lui convenait. Peut-être n’était-il qu’un lâche, au final ? Il ne faisait que manquer d’ambition seulement. Il avait eu besoin d’une bonne raison pour quitter le foyer familial, se dégager de l’emprise de son père. Il avait réussi, mais était-ce honorable ? Il était encore immature, peut-être s’en rendrait-il compte plus tard. En attendant, même s’il essayait de mettre un peu de blé dans le loyer de cette grande maison, il avait l’impression de profiter de son amie. Alors que pas du tout. Il adorait Imogen, elle avait été son pilier lorsqu’il commençait à chavirer. Elle était comme sa sœur, un point c’est tout. Par ailleurs, en parlant de la jolie blonde, il avait eu l’intention de lui faire une surprise cette après-midi et allait la chercher après ses cours, et l’emmener boire un verre. Cela faisait depuis quoi… Deux ou trois jours qu’ils n’avaient pas passé une après-midi, une soirée ou une journée entière rien que tous les deux ? Il avait comme besoin de ce moment privilégié avec elle, avec peu d’intervalle.
Du coup, il avait enfilé sa veste, avait enfourché sa moto et s’était dirigé vers l’université Fédérale de Rio. Les seules fois où il y mettait les pieds, c’était justement pour aller chercher Imogen. Il avait abandonné ses études, ce n’était pas pour les recommencer quatre ans après. Il arrivait devant l’endroit où son amie se posait pour discuter avant de repartir. Il ne pensait pas aux faits qu’elle avait peut-être prévu des choses, et à dire vrai, il s’en fichait. Il était le prioritaire. Il en avait profité pour allumer une clope, regarder son téléphone et attendre son amie. Il s’était redressé quand il avait vu sa silhouette arriver au loin, et un sourire s’était dessiné sur son visage. Les copines se dispersèrent, et quand elle fut assez proche pour qu’elle l’entende « - Allez poupée ! Je t’emmène boire un coup, ça fait longtemps ! » La clope se consumait rapidement, et il redémarra nerveusement sa moto qui vrombissait, de quoi plaire à beaucoup de femmes. D’ailleurs, il se demandait si quelques-unes étaient jalouses d’Imogen… Après tout, elle était belle, svelte, reconnue et surtout : elle était amie avec lui ( non non, il se prend pas pour de la merde xD ) Après tout, les femmes sont méchantes les unes contre les autres, de vraies vicieuses. Mais il était certain qu’Imogen s’en fichait, cela devait même lui plaire d’être enviée « - Et vu que t’as pas fait de bruits ce matin, et que tu t’es pas plainte la nuit quand j’suis rentré du boulot, je te paie tous les cookies du Starbucks que tu souhaites ! » Et puis, il lui devait bien ça.
Qu'y a-t-il de pire que quatre heures d'économie le vendredi après-midi ? Rien. Rien du tout, je vous l'assure. Affalée contre le dossier de ma chaise, je pianote sur mon téléphone en faisant mine d'écouter l'intervenant qui nous parle de croissance depuis plus de deux heures déjà. J'ai bien fait de me mettre tout en haut, je suis tranquille, mise à part un mec deux rangs plus bas qui me fait de l'oeil toutes les deux minutes, jouant avec son stylo pour faire le malin. Je lève les yeux vers lui après avoir envoyé un sms à mon meilleur ami, désintéressée, et je me met alors à pouffer de rire quand je le vois glisser de sa chaise après s'être retourné pour m'offrir son plus beau sourire, que je n'ai étrangement plus revu après. Il doit être content de lui, tout le monde l'a remarqué maintenant. « - Blaireau. » soufflai-je entre mes dents avant de reporter mon attention sur des choses plus... intéressantes. Jerem me répond quelques secondes plus tard et je souris comme une niaise devant mon téléphone. Qu'il est con.
Je passe les dernières heures à écouter d'une oreille la fin de l'exposé, griffonnant sur mes feuilles des formes diverses et variées qui semblent au final donner une sorte d'arbre aux ramifications étranges. Lorsque sonne enfin la fin des cours, je me lève en vitesse pour rejoindre Sonequa, que je surnomme Sony, dans le hall l'université. Un sourire, quelques bavardages, et je m'apprête à rentrer lorsque j'entends une voix familière m'interpeller. « - Allez poupée ! Je t’emmène boire un coup, ça fait longtemps ! » Un sourire illumine mon visage alors que je sens plusieurs visages se tourner vers moi. Tiens, en voilà qui vont encore croire et aller raconter que je sors avec ce mystérieux barman qui est aussi mon coloc. La presse va se régaler ! Je m'approche de mon meilleur ami en haussant un sourcil alors qu'il reprend. « - Et vu que t’as pas fait de bruits ce matin, et que tu t’es pas plainte la nuit quand j’suis rentré du boulot, je te paie tous les cookies du Starbucks que tu souhaites ! » Je m'apprêtais à répliquer pour le poupée, mais finalement, je laisse tomber. Des cookies du Starbucks quoi ! « - Heureusement pour toi que tu sais me prendre par les sentiments, sale gosse ! » Je dépose un baiser exagéré sur sa joue avant de prendre le casque qu'il me tend et de l'enfiler sur ma tête avec classe - comme toujours. Les dizaines de regards sont toujours posés sur nous, il y a même quelques téléphones qui nous filment, et j'avoue que j'apprécie avoir une certaine importance, comme cela. Oui mesdames, mon meilleur ami est canon et serviable. « - Souriez vous êtes filmés ! Tu vas devenir une star grâce à moi. » Ce n'était d'ailleurs pas si faux, il avait déjà fait quelques apparitions dans des magazines britanniques et brésiliens, avec la question qui semblait brûler les lèvres de tout le monde : la demoiselle Delacruz serait-elle en couple avec un certain Jeremiah ? Et bien non mesdames et messieurs, désolée de vous décevoir. Je m'accrochai alors d'une main au buste de Jeremiah, sourire aux lèvres, alors qu'il démarrait sa moto dans un vrombissement.
Dernière édition par Imogen H. Delacruz le Dim 25 Mai - 18:59, édité 1 fois
Tout le monde a un ami à chaque étape de sa vie, mais seulement quelques personnes ont le même ami à toutes les étapes de leur vie.
Elle est belle Imogen, surtout quand elle sourit de la sorte. Elle a un sourire sincère, pas ceux des magazines qui expriment toute l’hypocrisie du monde – du-moins de ce qu’il en pense. Il est content quand elle offre son sourire le plus authentique, il a l’impression d’être privilégié. « - Heureusement pour toi que tu sais me prendre par les sentiments, sale gosse ! » et à l’entente de cette phrase, il sourit avec autant de bêtise que possible, puis il rit, amusé par la remarque de son amie. Par la suite, elle dépose un baiser avec abus sur sa joue, il marmonna promptement dans sa barbe « - Hé, me viole pas la joue, non plus ! » Il ne remarque pas que les gens les regardent, les admirent et les photographient avec leur portable, ou on ne sait quoi d’autres d’ailleurs. A dire vrai, depuis qu’il connait Imogen, il a pris l’habitude. En réalité, même si c’est parfois lourd et pesant, ceci l’amuse. C’était devenu son quotidien, dorénavant. Il est vrai que sans elle, il n’était rien, peut-être même n’aurait-il jamais su ce que c’était que … tout ceci. « - Souriez vous êtes filmés ! Tu vas devenir une star grâce à moi. » Il se retourna, lui jetant un petit regard pour ensuite considérer les autres personnes autour d’eux : « - Baah, c’est pas ce qui m’intéresse, je suis déjà une star ! »
Ils roulèrent, peut-être parfois dangereusement, déjà au démarrage les pneus avaient crissés contre le bitume. Jeremiah adore l’adrénaline, et le danger. Sentir cette puissance vous prendre le cœur, c’était un peu comme une drogue pour lui. Ou peut-être n’était-ce seulement pour se faire remarquer. Ils se garèrent, tout près du Starbucks. Il avait donc ouvert la marche, faisant attention à ce qu’elle le suive de prés, parce qu’il y avait trop de monde dans les rues. Il ne savait plus différencier les touristes des habitants, il y avait tant de monde. Ce qui était étrange, c’était qu’il ne se sentait plus étranger dans ce pays. Il avait été obligé d’apprendre à parler le portugais alors qu’il n’en avait aucune notion lorsqu’il avait atterri ici pour la première fois, apprendre la culture et les coutumes aussi. Au final, il s’était plutôt bien intégré. Il se sentait même plus brésilien qu’anglais par moment. C’était drôle d’avoir un pays, une ville, dans la peau.
« - Euhhh, tu prends quoi d’habitude, déjà ? » C’était d’une futilité de se souvenir du café préféré de sa meilleure amie. Beaucoup de personnes disaient du mal de leur amitié, mais Jeremiah primait sur le silence. Il riait de ces personnes car s’il disait cela, c’est qu’il ne connaissait pas l’amitié. Personne n’a la même notion de l’Amour, de l’Amitié, de la Mort ou la Religion. Il était ami, et aussi proche avec Imogen parce qu’il partageait, justement, ces mêmes idéaux pour leur relation. La serveuse leur demanda ce qu’il voulait, ne leur laissant pas réellement le temps de choisir « - Quatre cookies, un moka eeeeeet… » Son regard, qui se fit interrogateur, se posa sur Imogen. Puis, il eut une illumination « - Un cappuccino ? »
Je sens le vent me frapper le visage avec force, ma visière ouverte, et mes cheveux se mettent à virevolter derrière moi lorsque Jerry fait crisser les pneus de sa moto noire sur le bitume. Alors que nous descendons vers la côte, j'observe le paysage splendide qui s'offre à nous et le soleil qui commence à peine à descendre sur l'horizon en ce jour de fin mai. J'aurais aimé arrêter le temps et partir rouler avec mon meilleur ami sur les routes désertes du Brésil, quitter Rio et tout laisser derrière nous. Prendre un nouveau départ, rien que tous les deux, et partir à l'aventure. Je me vois très bien vivre avec Jerry, sa moto et notre husky Micco, point barre. En fait, nous nous sommes bien trouvés, tous les deux. Il aime l'adrénaline, il ne se prend pas la tête et vit sa vie comme bon lui semble. Moi j'aime prendre des risques, je ne me prend que très peu au sérieux même dans le milieu professionnel et je ne me donne pas de limites. On se ressemble énormément sur beaucoup de points, et c'est sans doute ce qui fait notre complicité. Je resserre mon étau autour du buste musclé de Jerry et ferme les yeux, me laissant bercer par le ronronnement de la moto.
Les rues sont bondées, et nous se sommes qu'en mai. Mais avec la coupe du monde de football prévue pour juin, les gens arrivent en masse et les touristes affluent, au plus grand déplaisir des habitants... Heureusement, nous avons nos petits coins tranquilles, mais le Starbucks lui, est bien trop connu et donc bien trop fréquenté, si bien que nous avons de la peine à trouver une place. Enfin installés, Jerry me pose une question qui me surprend - ou pas. « - Euhhh, tu prends quoi d’habitude, déjà ? » Je le regarde alors par dessus mes lunettes de soleil d'un air dédaigneux du genre "tu te fous de ma gueule ?", mais je n'ai pas le temps de répliquer que la serveuse arrive. Allez, débrouilles toi pour la peine. J'offre un mince sourire à demi-sincère à la serveuse et reporte mon regard sur mon meilleur ami qui galère. Je remonte mes lunettes de soleil sur ma tête en me retenant de ne pas rire. « - Quatre cookies, un moka eeeeeet… » Il me regarde, interrogateur, presque désespéré, et je me contente d'hausser les sourcils. Allez, cherches, je sais que tu le sais. « - Un cappuccino ? » Je me redresse soudainement sur ma chaise et frappe dans mes mains. Oui, j'ai l'air d'une idiote, mais j'assume. « - Bravo ! Tu as gagné le droit de m'en payer un deuxième. » La serveuse disparaît en riant doucement et je souris à Jerry, fière de moi. « - Tu devrais savoir que ma boisson préférée est le cappuccino, c'est écrit dans tous les magazines voyons ! » J'aime jouer et rire de mon succès, je ne prend tellement pas ma popularité pour quelque chose d'important... Certes, je représente quelque chose pour mes "fans", et ils m'apportent un certain réconfort, dans le sens où je me sens appréciée et jolie. Mais je pourrais très bien me passer de toutes ces paillettes, de toute cette médiatisation. C'est peut-être d'ailleurs ce qui renforce cet impact que j'ai sur les gens, je ne sais pas. Je me mets à me tortiller sur ma chaise lorsque les hauts parleurs du Starbucks se mettent à diffuser Summer, de Calvin Harris. « - Alors, quoi de neuf ? » demandai-je à Jeremiah qui dans quelques secondes n'allaient pas tarder à m'accorder son regard désespéré.
Tout le monde a un ami à chaque étape de sa vie, mais seulement quelques personnes ont le même ami à toutes les étapes de leur vie.
« - Bravo ! Tu as gagné le droit de m’en payer un deuxième. » Lui rétorque-t-elle, peut-être un peu fière d’elle. Pour la peine, Jeremiah ne trouve rien d’autre à marmonner qu’un sympathique « - Merdeuse. » et à lui tirer la langue. C’est que parfois, il était puéril, comme un enfant. Et il y avait des jours où cela se remarquait plus que d’autres. A dire vrai, il avait tellement été encadré plus jeune, qu’il se retrouvait facilement désemparé. L’expérience de vivre seul, à plus de mille kilomètres de ses parents avaient, en quelques sortes, arrangés les choses. En quatre ans, il s’était forgé un caractère de molosse et il fallait l’avouer : il avait un peu mûri. L’instinct masculin voulant tout de même retarder la maturité, il s’en sortait plutôt bien. Il regarda la serveuse partir, et ne se gêna pas pour s’intéresser au plus bas de son dos, mais très vite, il se concentra de nouveau sur son ami, qui n’hésita pas à renchérir « - Tu devrais savoir que ma boisson préférée est le cappuccino, c’est écrit dans tous les magazines voyons ! » Il la regarda, amusé par sa remarque. Elle était ironique, tout le temps. C’était une particularité qu’il appréciait chez elle, elle prenait tout à la rigolade, comme lui. A l’inverse, Jeremiah était plus cynique qu’elle, et elle jouait beaucoup plus sur l’ironie et les mots. On pouvait faire tant de choses avec des mots. Jouer avec les sous-entendus, et les doubles sens. Le langage était une invention riche, et particulièrement dangereuse quand on voulait l’utiliser à mauvais escient. « - Si on croyait tout ce qu’on lisait dans les magazines, nous serions en couple en train de baiser partout dans notre villa et tu serais sûrement déjà en cloque. » Il soupira, mais continua à sourire. Les magazines… Ce support des médias. Au lieu de se pencher sur les célébrités, à sortir des tas de rumeurs – bien que cela leur plaise – ils devraient peut-être s’intéresser à ce qui se passe réellement à Rio. Mais les journalistes, tout comme la police, avaient peur et étaient facilement corrompus. Jeremiah appréciait l’ambiance qu’il y avait au Starbuck. C’était le seul endroit où ils arrivaient à se fondre dans la masse, sans qu’un imbécile de paparazzi ne vienne emmerder Imogen. Parfois, il faisait taire son amie, et lui disait d’écouter attentivement les personnes autour d’eux. C’était fou comme on se pensait intime dans un endroit aussi bondé… Il se souvenait, avec un sourire, de la conversation – ou plutôt la dispute – entre deux homos qu’ils avaient écouté quelques temps plus tôt. C’était drôle. Soudainement, Imogen s’agita sur sa chaise pile au moment où une musique – qui annonçait clairement l’été et les vacances – vint jusqu’à leurs oreilles. Il savait qu’elle allait sortir quelque chose, une anecdote, une blague, une débilité en tout genre… Ou une banalité « - Alors, quoi que neuf ? » Autant dire qu’il ne mit que quelques secondes avant de foutre sa main, l’air désespéré, sur son visage pour ensuite rire discrètement. Quoi de neuf ? « - Je sais pas, ils disent quoi les magazines ? » Toujours sur la même lancer, mais très vite il se reprit, pendant que la serveuse apportait leur commande « - On vit sur le même toit, je crois bien, mongolienne. » Mais il était vrai qu’ils n’avaient pas les mêmes horaires, et cela se faisait de plus en plus rare qu’ils réussissent à coïncider – facilement – leurs emplois du temps « - Pas grand-chose va. Les petits sont excités, du coup, je fais la police au lieu de danser et c’est assez tranquille au bar… » Par assez tranquille, c’était qu’il n’y avait pas trop de magouilles « - J’ai pensé aussi, à me prendre un troisième boulot, mais ça risque d’être assez chaud ! T’es pas période d’examen toi ? » Par la suite, il remercia la serveuse, et prit une gorgée de son moka, délectant le goût du chocolat qui se mariait plutôt bien avec l’amer du café.
« - Si on croyait tout ce qu’on lisait dans les magazines, nous serions en couple en train de baiser partout dans notre villa et tu serais sûrement déjà en cloque. » Le soupire de Jerry me fait sourire à nouveau et je laisse échapper un rire, mettant une main sous mon menton en faisant mine de réfléchir à ce qu'il venait de dire. « - C'est vrai, tu n'as pas entièrement tort. » assurai-je en acquiesçant d'un signe de tête. Je hausse alors un sourcil et pointe mon index vers lui. « - Et ne t'avises pas de me dire que tu n'as jamais tort ! » Ouf, j'ai été assez rapide.
Je souris de plus belle avant de me dandiner sur ma chaise et de lui demander ce qui se passait de beau dans sa vie. Oui, bon, ok, on habite sous le même toit, mais on ne se croise pas souvent, mine de rien ! On communique par post-it d'ailleurs là plupart du temps. Du genre "j'ai nourri Micco" ou "je fais les courses ce soir", c'est plutôt marrant et on y prend goût. Jerry me regarde, comme je m'y attendais, d'un air désespéré. « - Je sais pas, ils disent quoi les magazines ? » Je lève les yeux au ciel en riant doucement. « - On vit sur le même toit, je crois bien, mongolienne. » Je reprend alors tout mon sérieux et lui tire la langue d'un air susceptible. « - Pas grand-chose va. Les petits sont excités, du coup, je fais la police au lieu de danser et c’est assez tranquille au bar… J’ai pensé aussi, à me prendre un troisième boulot, mais ça risque d’être assez chaud ! T’es pas période d’examen toi ? » J'écoute Jerry attentivement. C'est fou comme je peux passer d'un état excité à un état de sérénité totale en à peine un dixième de seconde, comme un atome ! (truc de S, tu peux pas test mdr). Un troisième boulot ? Je songe d'abord à moi et à notre relation. Avec un travail en plus on se verra encore moins, on pourra passer encore moins de temps ensemble alors qu'on a déjà du mal trouver des horaires qui coïncident. Et puis je relativise. Serait-ce encore à cause du fait qu'il veut payer un peu plus que sa part dans le loyer ? Je sais qu'il est mal à l'aise avec le fait que je verse beaucoup plus que lui et il n'arrive pas à assimiler le fait que cela ne me dérange pas. Et puis après tout, je suis plus souvent dans la piscine que lui. « - Pourquoi tu veux un nouveau boulot ? » demandai-je pour confirmer mon doute. « - Si ça arrive là, durant juin. Mais ça devrait le faire, tu sais que je suis douée. » dis-je avec humour. Mais je n'ai pas totalement tort, car malgré ma déscolarisation de quelques mois au début de mes études, j'ai pu rattraper mon retard et je suis une bonne élève à présent. J'ai eu la chance de toujours avoir eu des facilités avec les cours, ce qui m'arrange car je n'ai pas vraiment le temps de bosser en dehors de l'université. La serveuse nous dépose notre commande et disparaît. Je porte mon cappucino à mes lèvres et en boit une gorgée. Une glace aurait été plus en accord avec le temps, mais tant pis.
Tout le monde a un ami à chaque étape de sa vie, mais seulement quelques personnes ont le même ami à toutes les étapes de leur vie.
« - Et ne t’avise pas de me dire que tu n’as jamais tort ! » Il lève les bras, l’air faussement innocent. Elle l’a devancé, elle commence à le connaître trop bien. Mais il le tolère, à dire vrai, elle est sûrement la seule personne qui a le privilège de le connaître, même si se sentir trop prévisible l’exaspère. Il préfère alors sourire, et répondre « - J’allais juste te dire que de toute manière, tout le monde – et même toi – rêve d’avoir un petit ami comme moi. » ironisa-t-il, se foutant complètement de l’autodérision qu’il venait de s’infliger. Il se connaissait, il n’était pas fait pour être casé, pas pour le moment du-moins.
Il la voit passer par tous les stades possibles et imaginables. Excitée, sérieuse, boudeuse, amusée encore excitée pour finir par être une fois de plus, un semblant sérieuse. C’était, une fois de plus, une partie de sa personnalité qui faisait que ça collait bien entre eux. Puis, mine de rien, ils trouvaient toujours le moyen d’être en contact, comme s’il leur était devenu impossible de ne plus se parler, même pour deux minutes, alors qu’ils avaient la certitude de se revoir le soir-même ou durant la nuit, ou vite-fait le matin, voire l’après-midi. Même pour cinq minutes… Mais non, ils se sentaient obligés de s’envoyer un sms dans la journée, ou de s’appeler. « - Pourquoi tu veux un nouveau boulot ? » finit-elle par demander, alors qu’il buvait quelques gorgées de son café. Il avait cependant enchainé sur une autre question, parce que… Il voulait ne pas lui répondre, tout simplement. Elle le savait, elle en doutait, mais mieux valait-il ne rien lui dire. « - Si ça arrive là, durant juin. Mais ça devrait le faire, tu sais que je suis douée. » Evidemment qu’elle était douée, et ceci lui arracha un sourire. Il s’installa un peu plus détendu contre le dossier de sa chaise, laissant même trainer une jambe au beau milieu du passage et continua à la regarder : « - Si tu veux de l’aide pour réviser, tu sais que tu peux me demander. » Et il savait qu’elle ne le ferait pas, parce qu’il était impossible de bien réviser en sa compagnie. Il ne savait plus ce que c’était d’étudier. Jeremiah avait abandonné, il avait certes commencé une bonne année lorsqu’il était encore à Londres, mais dès lors, il travaillait. Il n’aimait pas rester planter sur une chaise, c’était tout. Un peu trop impulsif et hyperactif, sûrement. Il ne se concentrait que très rarement, sauf quand il lisait ou regardait un bon film. Encore fallait-il qu’il en trouve le temps. Il attrapa l’un des cookies qui trainait sur la table, et en croqua un bout. Il délectait les petites de chocolat qui fondaient dans le creux de sa langue. « - Au juste, tu veux manger quoi, ce soir ? » Jeremiah savait cuisiner, et il en profitait pour faire à manger à Imogen, même lorsqu’ils ne mangeaient pas ensemble. C’était comme un moyen de se rattraper. Pour lui, l’amitié était construite sur de l’intérêt, du donnant-donnant. Notre conscience nous obligeait à rendre la pareille. C’était ainsi. « - Vu que y’a des courses à faire, j’en profite pour prendre ce que tu veux. Vais rentrer tard encore. » Et puis il s’approcha un peu d’elle, et lui murmura « - Au-moins, tu seras tranquille, tu pourras ramener qui tu veux. » Il lui fit un clin d’œil, et eut un sourire presqu’obscène.
« - Si tu veux de l’aide pour réviser, tu sais que tu peux me demander. » Jerry a bien prit le soin de me pas répondre à ma question à propos de son boulot, mais il ne s'en tirerait pas comme ça. Il oublie que j'ai bonne mémoire et qu'on ne me dupe pas facilement. Lorsqu'il fait allusion à des révisions avec lui, je le regarde avec étonnement. « Je préférerais encore réviser avec Mic' ! » dis-je avec humour. Après tout, Jerry est bien conscient qu'il n'est pas la meilleure compagnie pour réviser et certes, il a peut-être fait du droit, mais disons qu'à nous deux on pourrait rapidement partir dans les tours et je n'aurais jamais mon semestre. Heureusement, il est capable de rire lorsque je me fous de lui à propos des études, il ne le prend pas mal et tant mieux. Il est vraiment comme moi, il ne prend rien au sérieux, la seule différence c'est que pour ma part j'accorde une certaine importance à mes études parce que je sais que je n'ai pas le choix. Après quelques échanges de rires, nous dévorons chacun un cookie avant que mon meilleur ami ne reprenne la parole. « - Au juste, tu veux manger quoi, ce soir ? » Je hausse les sourcils, pensive, avant de lui faire une moue en mode "aucune idée, je te laisse de débrouiller". De toute façon, je mange comme lui, donc au moins je ne suis pas difficile. Et j'ai un avantage : je ne grossis pas. Oui, c'est une sacré qualité ! « - Vu que y’a des courses à faire, j’en profite pour prendre ce que tu veux. Vais rentrer tard encore. » Je souris mais déchante bien vite lorsque je le vois s'approcher de moi, et me déclarer sur le ton de la confidence : « - Au-moins, tu seras tranquille, tu pourras ramener qui tu veux. » Je laisse échapper un hoquet de surprise avant de me mettre à rire. Il est pas sérieux là ? « C'est toi qui dit ça ?! Tu veux qu'on fasse des stats et qu'on se mette à compter ? » Pardonnez moi mais monsieur est le premier à ramener une fille différente presque TOUS les soirs. Heureusement que nos chambres sont chacune à l'opposé de la maison tiens. Je plains Micco qui dort dans le salon... Brr. Désespérée par la remarque de mon ami, mais un grand sourire amusé sur les lèvres, je secoue la tête en riant. Décidément, ce mec va finir par me tuer. Reprenant alors mon sérieux, mais toujours souriante, je bois quelques gorgées de mon café avant de reprendre. « Bon, pourquoi tu veux un troisième job ? » Tada. Comment refroidir l'ambiance en deux-deux.
Tout le monde a un ami à chaque étape de sa vie, mais seulement quelques personnes ont le même ami à toutes les étapes de leur vie.
C’est une merdeuse Imogen. Mais il l’adore et c’est tout ce qui compte. En réalité, il l’a assimilée comme une sœur parce qu’il était en manque de repère. Il ne cesse de se répéter qu’elle est comme sa jumelle, même si trois ans d’âge les séparent. Peut-être que dans une vie antérieure, ils ont déjà été autant liés, qui sait ? Vous savez, quand on vous dit que quelque part dans le monde, une personne est votre moitié… Jeremiah n’y croyait pas, jusqu’au jour où il l’avait rencontrée. Une âme sœur comme qui dirait. Cela ne veut pas forcément dire qu’il y a de l’Amour – bien que ce qu’ils vivent est une forme d’amour – mais … C’est presqu’aussi fort. Jamais il ne s’était entendu ainsi avec sa demi-sœur, même s’il l’aime. Mais, c’est triste à dire, il choisirait sans hésiter Imogen. Parce qu’ils sont sur la même longueur d’ondes. Il la taquine, et lui tire la langue lorsqu’elle avoue qu’elle préfèrerait réviser avec leur chien. Il peut très bien l’aider, mais il est vrai qu’il n’était pas patient. Du coup, il enchaine sur ce qu’elle aimerait manger. Elle lui montre clairement qu’elle ne sait pas, qu’elle n’a aucune idée, et qu’elle suit. Serait-ce encore soirée pizza pour elle ? Parce qu’à ce moment-là, il lui prenait du surgelé. Il hausse les épaules et s’installe confortablement – encore une fois – contre le dossier de sa chaise, cookie dans la bouche après avoir ajouté la touche d’humour – un peu lourd – qui la fit hoqueter de surprise. « - C’est toi qui dit ça ?! Tu veux qu’on fasse des stats et qu’on se mette à compter ? » Il étire un grand sourire, satisfait. Elle exagère un peu… C’est pas comme s’il ramenait un harem non plus. « - Ooooh ça va en ce moment ! Je ramène plus personne… » En même temps, il avait dégagé tous ses anciens plans culs, et la plupart s’était mis en couple, ce qui l’horripilait. A leur âge, déjà être casé… C’était une atteinte à sa liberté. Mais il fallait aussi avouer, qu’inconsciemment, sa tête était ailleurs. Il pensait souvent à cette jolie jeune femme à la chevelure de blé, qui le faisait tout bonnement rêver. « - Puis fais pas ta prude va ! T’as le droit de t’amuser. » un autre clin d’œil. Ils étaient des adultes, responsables et vaccinés. Puis, s’ils croyaient à ce que disaient les journaux… Il y aurait de forte chance à ce qu’Imogen soit une nymphomane. Il aimait les médias, c’était un bon divertissement lorsque l’on connaissait la vérité. « - Bon, pourquoi tu veux troisième job ? » Il s’arrête soudainement de sourire, et se repositionne correctement, droit « - Jamais tu lâches l’affaire ? » déclare-t-il, un peu exaspéré. Ce qu’il déteste chez elle, cependant, c’est cette curiosité à tout bout de champs. Elle n’était pas investigatrice non plus. « - Je me fais chier. Mais je pense prendre quelques cours d’adultes pour le hip-hop, il y a une forte demande et j’ai déjà deux groupes d’une bonne quinzaine de personnes. Après, un troisième job ne me ferait pas de mal. Tu sais bien que je n’aime pas être inactif. » Ceci, elle le savait peut-être même mieux que lui. Lorsqu’il faisait rien, et c’était souvent le cas en ce moment, il nettoyait leur villa de fond en comble, promener Micco, ou ramener une femme – voire peut-être un homme, même si cela était rare – et s’amuser avec. Mais c’était trop calme, trop posé, trop… C’était devenu un quotidien, et le quotidien l’ennuyait et l’angoissait. Sauf que la raison première était de vouloir aider, un peu, Imogen a payé le loyer.
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Qu'y a-t-il de pire que quatre heures d'économie le vendredi après-midi ? Rien. Rien du tout, je vous l'assure. Affalée contre le dossier de ma chaise, je pianote sur mon téléphone en faisant mine d'écouter l'intervenant qui nous parle de croissance depuis plus de deux heures déjà. J'ai bien fait de me mettre tout en haut, je suis tranquille, mise à part un mec deux rangs plus bas qui me fait de l'oeil toutes les deux minutes, jouant avec son stylo pour faire le malin. Je lève les yeux vers lui après avoir envoyé un sms à mon meilleur ami, désintéressée, et je me met alors à pouffer de rire quand je le vois glisser de sa chaise après s'être retourné pour m'offrir son plus beau sourire, que je n'ai étrangement plus revu après. Il doit être content de lui, tout le monde l'a remarqué maintenant. « - Blaireau. » soufflai-je entre mes dents avant de reporter mon attention sur des choses plus... intéressantes. Jerem me répond quelques secondes plus tard et je souris comme une niaise devant mon téléphone. Qu'il est con.